Le monde du désordre complet

Notons d’abord l’ampleur du jet issu de la soupape de Denis Papin, jet qui se dissipe dans l’atmosphère.

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Ce jet supersonique est une « structure dissipative » appelée ainsi par Ilya Prigogine pour associer les deux idées d’ordre et de désordre si intimement liées. Ces structures dissipatives échangent de la matière et de l’énergie avec l’extérieur, ce qui leur permet de se maintenir en l’état tant qu’elles sont alimentées.

Dans les soupapes actuelles, le jet supersonique n’est plus un jet libre ; il est maintenant confiné dans une tuyauterie de récupération du fluide. L’écoulement va se débrouiller pour dégrader son énergie cinétique par tous les moyens à sa disposition – en énergie calorifique, énergie vibratoire, énergie sonore – menaçant ainsi l’intégrité de l’installation. La puissance motrice du jet, exprimée en mégawatts, excite la structure, l’affaiblit; des fissures peuvent apparaître.

Est-il bien raisonnable de laisser le système moléculaire créer ces structures dissipatives qui mettent en danger les dispositifs en introduisant le chaos dans nos installations énergétiques majeures?

Pour reprendre le contrôle du système, nous devons appliquer le principe de la pire action.

Le principe de Pire Action

Le deuxième principe de la thermodynamique classique stipule que: l’énergie se dégrade.

Pour nos besoins, nous ré-interprétons ce principe en l’exprimant comme suit:

L’énergie doit parfois être rapidement dégradée. C’est particulièrement le cas pour les soupapes.

Plutôt que de permettre à l’énergie de se dégrader d’elle-même à sa convenance, nous devons appliquer le principe de pire action pour détruire rapidement ces jets supersoniques qui créent des situations catastrophiques dans les soupapes.

L’ordre et le désordre sont présents dans une structure dissipative, et sont donc également présents dans un jet supersonique. Le principe de pire action stipule de supprimer l’ordre contenu dans une telle structure en y organisant le plus complet désordre.

Mais comment cela peut-il être fait?

La nature fournit la réponse; il suffit de l’observer attentivement. Chaque fois que les flux sont supersoniques, il est possible de dégrader massivement et rapidement l’énergie grâce à une utilisation singulière de ces écoulements. L’instrument qui applique le principe de la pire action est appelé dégradateur de l’énergie cinétique (KED) ou plus simplement un vistemboir entropique.

Alors que, dans les cas courants, le système moléculaire s’organise de lui-même pour dégrader l’énergie cinétique sans se préoccuper ni de notre sécurité ni de l’installation, le principe de pire action propose d’inverser les rôles : mettre le plus grand désordre dans le monde des molécules pour échapper au chaos dans notre monde macroscopique.